La hache libérale dans le programme québécois de procréation

Le gouvernement libéral actuel du Québec a déposé le 28 novembre dernier un projet de loi (projet de loi 20) qui mettra fin à la couverture de la fécondation in vitro par la RAMQ.
Le premier ministre Philippe Couillard et le ministre de la Santé Gaétan Barrette avaient pourtant promis en période préélectorale de ne jamais toucher aux soins directs à la population. Ils le font spécifiquement à 17% des couples québécois, qui sont infertiles.
S’il est adopté comme tel, le projet de loi 20 sera une véritable catastrophe pour les couples infertiles québécois. Il s’agira d’un moment très triste dans l’histoire du Québec, pourtant en pleine période de dénatalité avec un indice de fécondité de seulement 1.68 enfant par femme en 2012. L’impact d’une telle politique anti-nataliste, sous-estimé par ce gouvernement, sera beaucoup plus considérable qu’il ne le croit. Cela affectera non seulement les couples infertiles, mais également leurs proches (parents, grand-parents, frères, soeurs, collègues de travail, amis, etc.).
Parmi les éléments les plus préoccupants du projet de loi 20, concernant l’aide médicale à la procréation, on note entre autres:

  • la suppression de la couverture du régime public d’assurance maladie pour toutes les techniques de fécondation in vitro alors que la couverture de l’insémination artificielle sera maintenue. Pourtant, l’efficacité de l’insémination artificielle a été en 2013 sérieusement remise en question par les sociétés savantes médicales comme le National Institute for Heath and Care Excellence (NICE, Royaume-Uni), en plus d’exposer les femmes à des risques accrus de grossesse multiple puisque pratiquement toujours combinée à des agents ovulatoires ! En fait, le guide de pratique NICE ne recommande plus l’insémination artificielle à cause de son inefficacité et recommande plutôt le recours direct à la fécondation in vitro après deux ans d’infertilité inexpliquée (http://goo.gl/eOHupP).
  • Qu’aucune activité de fécondation in vitro ne pourra être exercée chez une femme âgée de moins de 18 ans et de plus de 42 ans. Cet article, qui ne laisse aucune liberté au jugement médical, est préoccupant. Il faut comprendre ici qu’une femme infertile de plus de 42 ans ne pourrait plus avoir recours à une FIV au Québec, même si son couple en assumait entièrement les coûts. Une jeune femme de 17 ans atteinte d’endométriose sévère ne pourrait quant à elle avoir recours à un prélèvement de ses ovules et pourrait se voir ainsi amputer chirurgicalement ses deux ovaires sans pouvoir préserver sa fertilité !
  • L’imposition d’une limite de transfert d’un seul embryon chez les femmes de moins de 37 ans, ne laissant encore là aucune place au jugement clinique
  • L’interdiction à un médecin de diriger une personne vers une clinique de procréation  assistée située hors du Québec si les normes ne sont pas conformes à celles prévues par la loi québécoise
  • L’imposition par le ministre et le gouvernement d’une période de relations sexuelles et d’un nombre d’inséminations artificielles avant d’avoir recours à une fécondation in vitro, créant ainsi une discrimination, particulièrement envers les couples hétérosexuels, en s’ingérant directement dans leur chambre à coucher.

Plutôt que de limiter la couverture des procréations assistées uniquement à l’infertilité médicale, le gouvernement libéral aura donc préféré, par manque de courage politique, couper les services à tous.
Le crédit d’impôt proposé pour la fécondation in vitro est par ailleurs loin d’être favorable (voir plus bas le Bulletin d’information du ministre des Finances). Il ne pourra ainsi être accessible à un couple lorsqu’un des conjoints a déjà eu un enfant avant le début d’une FIV. Il se limitera ainsi uniquement au couple n’ayant jamais eu d’enfant. Une femme infertile, vivant avec un conjoint qui a déjà un enfant avec une autre partenaire, se verra donc priver de la joie d’enfanter à l’aide d’un crédit d’impôt. L’homme infertile, quant à lui, ne pourra connaître la joie d’être père.
Le médecin aura également l’obligation d’attester que la femme ou le conjoint qui désire avoir recours à une FIV n’a jamais subi de stérilisation volontaire ou de vasectomie, transformant ainsi le médecin en véritable Tonton Macoute.
Le couple moyen ayant un revenu familial de 68000$, déjà inférieur à la moyenne canadienne, ne pourra avoir accès qu’à 64% du crédit d’impôt proposé. On peut donc présumer qu’il leur en coutera plus de 2500 $ par FIV malgré le crédit d’impôt. Ce crédit d’impôt chute d’ailleurs à 50% lorsque le revenu familial est de 85000$ et à seulement 25% lorsque le revenu familial est de 115000$.
Il s’agit, à notre connaissance, de la seule maladie à être ainsi ostracisée au Québec. Pourquoi cette discrimination ? Le même gouvernement continue pourtant à encourager des méthodes de dénatalité en les défrayant entièrement par la RAMQ, comme la vasectomie (plus de 10000 par année) et la ligature tubaire (environ 5000 par année), les interruptions volontaires de grossesse utilisées parfois comme méthode de contraception, sans imposer de limite.
D’autres méthodes chirurgicales chez des couples ayant déjà eu des enfants, comme la déligature (réanastomose tubaire) et l’inversion de la vasectomie (vasovasostomie) restent également couvertes par la RAMQ.
Les couples infertiles, n’ayant quant à eux jamais eu d’enfant, devront payer pour avoir accès à la FIV.
C’est le loup dans la bergerie, le pied dans la porte et une atteinte à l’universalité des soins en santé au Québec. Le gouvernement supprimera-t-il un jour la couverture RAMQ et imposera-t-il un crédit d’impôt à un fumeur afin qu’il puisse avoir accès à une chirurgie cardiaque, ou à une radiothérapie ou à une chimiothérapie pour son cancer du poumon?
Les couples infertiles semblent dorénavant frappés d’ostracisme par le gouvernement libéral du Québec.
Vous désirez fonder une famille. Rien de pire que de rester passif. Nous vous encourageons donc à vous investir en devenant membre de l’Association des couples infertiles du Québec (ACIQ: http//www.aciq.ca) et en y jouant un rôle actif.
Nous vous encourageons également à manifester votre désaccord directement au premier ministre et au ministre de la santé, en copiant votre député:
Au premier Ministre du Québec, M. Philippe Couillard
Conseil exécutif
Édifice Honoré-Mercier
835, boulevard René-Lévesque Est
3e étage
Québec (Québec)  G1A 1B4
Téléphone : 418 643-5321
Télécopieur : 418 643-3924
Site personnel : http://www.premier-ministre.gouv.qc.ca
Vous aurez accès à l’onglet Premier ministre – Joindre le premier ministre; vous pourrez inscrire vos commentaires,en  sélectionnant le sujet de votre message: Santé et les Services sociaux.
Au ministre de la Santé, M. Gaétan Barrette
Ministère de la Santé et des Services sociaux
Édifice Catherine-de-Longpré
1075, chemin Sainte-Foy
15e étage
Québec (Québec)  G1S 2M1
Téléphone : 418 266-7171
Télécopieur : 418 266-7197
ministre@msss.gouv.qc.ca

Documentation pertinente:
Communiqué du ministre de la santé: http://goo.gl/Hrjg4G
Allocution du ministre de la santé sur le projet de loi 20 : http://goo.gl/MMnuWN
Mouvement Vague Espoir (ACIQ) : http://vagueespoir.com/projet-de-loi-20/
Projet de loi 20: http://goo.gl/72e5Mg
Bulletin d’information. Ministre des finances. Revue de l’aide fiscale accordée aux personnes ayant recours à la voie médicale pour devenir parents: http://goo.gl/QbbNjg

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